Catalogue « Moderne Cythère », Les Olivétains, Saint-Bertrand de Comminges, 2016
Le mot de François
Présenter au plus grand nombre les œuvres d'artistes au sein d'un territoire chargé d'histoire, alliant intérêt culturel et touristique, telle est la volonté du portée par le Conseil départemental de la Haute-Garonne, un dessein qui se trouve magnifiquement concrétisé sur le prestigieux site de Saint-Bertrand-de Comminges. Au cœur de cet espace architectural unique, les salles d'exposition abritées par le bâtiment des "Olivétains" offrent à la création artistique un splendide écrin invitant le visiteur à découvrir des univers singuliers, à pénétrer des territoires nouveaux comme autant de lignes ce crêtes propices à éveiller les imaginaires. Durant tout l'été l'artiste peintre toulousain François Malbreil donne à admirer le panorama créatif d'une œuvre d'une rare diversité, riche et foisonnante de paysages et natures contrastés, où l'œil se posera tour à tour etv avec gourmandise ouverte par l'étrave d'un brise-glace rouge, les nocturnes profonds des ciels de Madagascar, ou le bleu indigo de la mer des Seychelles. Malbreil est un artiste de la trempe des grands voyageurs, un arpenteur de tous ces continents et de toutes ces îles qui nourrissent son inspiration afin de nous l'offrir en partage dans un style architecturé où l'intensité de la lumière, des lumières, demeure le lien et l'empreinte. Moderne Cythère, tel est le nom donné par Malbreil à cette exposition des "Olivétains". Embarquons sans tarder pour ce voyage vers l'île des plaisirs, l'île aux trésors d'un artiste qui regarde le monde et l'éclaire de la puissance de son imaginaire.
George Méric
Président du Conseil départemental de la Haute-Garonne
Les Olivétains
En 1856, fuyant la confiscation des biens du clergé régulier en Italie, l'abbé Dom Giovanni Schiaffini vint se réfugier à Saint-Bertrand-de-Comminges et Ouvrit un établissement de l'Ordre des Olivétains à l'emplacement de l'ancien évêché de Cominges. Il y fit bâtir une chapelle attenante à un bâtiment conventuel, mais après vingt ans de présence au pied de la cathédrale, les Olivétains furent expulsés. Abandonnés, les bâtiments tombèrent progressivement en ruine. En 1920, la Société Archéologique du Midi de la France, alors en charge des fouilles archéologiques menées sur le site antique, fit l'acquisition des vestiges de ce couvent. La chapelle devint ainsi sous le nom de "Galerie du Trophée" une annexe du musée de Comminges. A partir de 1930, y fut présentée au public une belle collection de marbres antiques, jusqu'à l'abandon progressif du lieu dans les années 1970.
En 1985, soucieux de préserver ce patrimoine historique local, le Conseil général (aujourd'hui Conseil départemental de la Haute-Garonne) acquit le bâtiment et en décida la restauration. Entièrement rénové, le bâtiment des "Olivétains" ouvrit ses portes au public en 1990. Les "Olivétains" sont aujourd'hui un pôle touristique et culturel, site qui abrite un espace d'informations touristique, un service de visites guidées du site et de département accompagnées par des guides conférenciers, ainsi qu'une librairie culturelle spécialisée. Par ailleurs, le conseil départemental de la Haute-Garonne invite chaque année des artistes à présenter leurs œuvres dans les salles d'expositions du bâtiment. La sélection permanente qui s'est constituée au fil des saisons ... Illisible . A poursuivre avec le catalogue en mains !!
Paysage polaire avec cargo rouge
Huile sur toile
55 x 125 cm (p1)
2014
C'est une belle fin de journée. Debout dans l'atelier je regarde les toiles que j'ai choisies pour les Olivétains. Elles me rappellent des lumières, des ambiances diurnes ou nocturnes, crépusculaires parfois. Pour beaucoup, je les ai peintes au retour de voyages lointains - aux Antilles, aux Canaries, en Chine, à La rRéunion, aux îles subantarctiques françaises, en Terre Adélie, à Madagascar. D'autres m'ont été inspirées par des ballades dans ce midi toulousain où l"'histoire familiale m'a fait prendre racine. Une chose est sûre : où que mes pas m'aient porté sur cette terre, ja n'ai jamais recherché le pittoresque ni l'exotisme mais avec obstination une certaine façon de regarder le monde à bonne hauteur et de le peindre dans une lumière adéquate.
Chaque peintre doit trouver une lumière qui lui est propre. La mienne est souvent tropicale, un tropique contemporain loin des clichés surannés d'un Eden rêvé. Ainsi dans le choix des toiles qui vont de 1981 à 5016 j'affirme sans le claironner une mise en scène de notre modernité. Les camions et pick-up, les voitures et les trains, les avions et les cargos ont définitivement transformé ces paysages tropicaux saturés de lumière. Dans les zones polaires, ce sont les cargos qui donnent forme à la glace, l'éventrent, la disloquent, la repoussent, l'amassent sur les rebords escarpés. J'aime peindre les pelleteuses, les stations-service, les bâtiments industriels et les pylônes électriques, autant d'emblèmes des temps modernes. Un pick-up au bout d'une jetée éclaire de ses phares un carré de bitume rongé par des herbes folles. Au cœur de la nuit, cette trouée de lumière aveuglante parle à sa façon de notre emprise sur le monde : une emprise aussi fugace que parcellaire.
De cette série d'huiles sur toile, d'aquarelles, de céramiques, de gravures et de lithographies, l'homme est absent, au moins dans sa représentation physique. Le parti pris peut interroger le spectateur voire l'inquiéter. Il peut aussi ouvrir la voie de la contemplation de la contemplation.
Cargo polaire. Coque grise
Huile sur toile
145 x 65 cm (p2)
2013
Etrave et glaces
Huile sur toile
73 x 116 cm (p3)
2013
Brume polaire avec cargo rouge
Huile sur toile
89x 116 cm (p4)
2013
Double page
Grand brise-glace rouge
Huile sur toile
65 x 173 cm (p5)
2014
Brise-glace et banquise
Huile sur toile
60 x 93 cm (p6)
2013
Brise-glace rouge Vue aérienne
Huile sur toile
116 x 89 cm (p7)
2013
Grande coque bleue
Huile sur toile
81 x 116 cm (p8)
2012
ATR Matin d'hiver
Huile sur toile
146 x 114 cm (p9)
2014
Etrave rouge
Huile sur toile
116 x 89 cm (p10)
2012
Double page
Avion-cargo avec panache de neige
Huile sur toile
40 x 150 cm (p11)
2014
Remorque Hiver
Huile sur toile
119 x 146 cm
2012
Remorque Hiver
Huile sur toile
119 x 146 cm (p12)
2012
J'ai deux ateliers : l'un à Toulouse et l'autre aux Issards. Celui des Issards me plait infiniment avec son exposition côté sud. J'y peins depuis 2015. Les grandes baies vitrées ouvrent sur le jardin et je ne me lasse pas d'observer la lumière qui change au fil des jours et des saisons. Il y a toujours quelque chose à regarder dans un jardin et je quitte volontiers mon chevalet pour en faire le tour.
Laissant l'atelier et tout ce qui y fermente, je prends souvent mon veux break pour parcourir au petit bonheur les routes de l'Ariège. Je m'arrête parfois devant une scène banale, un paysage d'allure à priori quelconque : une forêt dense qui s'éclaircit à sa lisière, des rollers dans un champ, un terre-plein de village.
Aussitôt l'envie me prend de fixer une image de ce monde fragile et changeant. Rien de spectaculaire, plutôt le sentiment de peindre le monde que les hommes habitent. Plus tard, parfois plusieurs années plus tard, cette image mentale deviendra un tableau ou une gravure
Rocade Avant l'autoroute
Huile sur Bois Marouflé
115 x 140 cm (p13)
1981
Bages les filets
Huile sur toile
65 x 140 cm (p15)
2012
Diptyque
Suburbia
Huile sur toile
20 x 40 cm (p16)
2012
Nocturne sous ciel voilé
Huile sur toile
130 x 162 cm (p17)
1982
Mon travail est entièrement lié au voyage et aux îles, sans doute parce que les éléments naturels y sont moins policés qu'en Europe. J'aime l'excès des cyclones, le fracas des icebergs, les cieux aux dégradés infinis, les gris de pluie, la luxuriance tropicale et l'aridité minimaliste des déserts, la mer qui sans cesse se réinvente et la brise dans les palmes des cocotiers.
Lors de mes pérégrinations, j'accumule une documentation sur les cargos, les trains et autres engins mécaniques. Dans ce florilège de la civilisation mécanique, les camions se taillent une place de choix. Leur aspect d'insectes caparaçonnés a quelque chose de touchant et de fascinant à la fois. J'en ai croisé sur toutes les routes du globe, de la Chine aux Caraïbes et de Madagascar aux bases polaires de l'Océan Indien. Partout, ils m'ont fasciné. Depuis des décennies, j'en ai fait l'objet de mes tableaux, des héros silencieux qui témoignent des énigmes de notre modernité, du rapport problématique des humains avec cette planète qu'ils ne cessent de sillonner.
Les cargos produisent aussi cet effet de masse et de détail. Ils sont la contrepartie aquatique es camions. De façon métaphorique, ils voguent dans ma peinture des mers tropicales aux mers polaires. En pleine mer ou à quai, de nuit comme de jour, sur des mers calmes ou démontées, ils tissent la mythologie de nos rêves. Leurs mâts et structures dressent verticalement l'oriflamme de l'homme sur l'horizon liquide.
J'ai arpenté la ville de Toulouse à ma recherche de bâtiments contemporains -béton, métal et verre - sertis dans leur inévitable écrin d'arbustes et buissons. J'avais en tête une architecture cosmopolite et moderniste, mise en scène à travers un jeu sophistiqué d'éclairages industriels, de lumières cachées, modifiant la perspective habituelle jusqu'à la rendre méconnaissable.
La nuit modifie en profondeur la perspective de l'espace et de la couleur, et cela m'avait amené à réfléchir à la couleur de la nuit et à sa traduction picturale. Etait-elle bleue, brune, gris cendré, rousse ? Comment peindre la lumière électrique ?
La ville pétrifiée dans le silence des heures avancées du matin devenait un étrange théâtre que la lumière électrique sculptait en pans d'ombre, un mausolée abandonné au silence. Dans ma quête du nocturne contemporain, j'ai été captivé par les espaces suburbains dont la banalité laissait sourdre un malaise inquiétant : une rue industrielle, une entrée de rocade émergeant du brouillard matinal, une aire d'autoroute vide...
Nuit rousse 1 Moissonneuse jaune
Huile sur toile
100 x 81 cm (p18)
1993
Nuit rousse 2 Camion
Huile sur toile
65 x 100 cm (p19)
1993
Nuit rousse 3 Tractopelle
Huile sur toile
65 x 81 cm (p20)
1993
Caraïbes Embarcadère avec pick-up
Huile sur toile
91 x 122 cm (p21)
1998
Madagascar Pick-up et pirogues
Huile sur toile
73 x 116 cm (p22)
2012
Martinique Cyclone
Huile sur toile
57 x 130 cm p23)
1981
Epave 4 Sur les récifs
Huile sur toile
81 x 100 cm (p24)
2012
Diptyque
Cargo épave Diego Suares
Huile sur toile
19 x 54 cm (p25)
2013
L'atelier est un arène mentale. On y rejoue sans cesse le monde. Devant la profusion des visages et des corps, des scènes et des paysages, devant l'infinie variété des lumières et des ombres projetées dans l'espace et le temps, l'esprit chavire. Je ne peindrai qu'un nombre limité de toiles. Il faudra opérer des choix ou du moins accepter ceux qui s'imposeront à moi par des voies forcément obscures. Mais je fais le pari que sur chaque toile se retrouveront quelques éclats de l'infini, quelques pépites du trésor entrevu. Avec thèmes et variations. Avec un mélange inextricable de fantaisie, de goût et de réflexions. Au-delà de la variété des techniques - huiles sur toile, gravures, lithographies ou céramiques - je suis certain que le lien qui unit mes œuvres est la lumière, sa nature, son éclat et son intensité qui varient au fil des heures, des latitudes et des années. quoi qu'on en dise, la lumière ne quitte jamais l'esprit du peintre et la peinture n'est rien si elle n'est pas d'abord un art de la lumière. J'ai toujours aimé les fulgurances des cieux tropicaux et je ne ne me lasserai jamais d'y peindre des cargos échoués exposant leurs carcasses rouillées à la corrosion de l'océan. Et pour rien au monde je ne renoncerai à la lumière tangente des pôles, celle qui éclaire à onze heures du soir le brise-glace qui se fraye un passage entre les icebergs.
Cargo épave 1 Plage
Huile sur toile
81 x 116 cm (p26)
2011
Seychelles Mahé Case béton et canot rouge
Huile sur toile
60 x 73 cm (p27)
2001
Seychelles Paysage avec fûts rouges
Huile sur toile
60 x 73 cm (p28)
2003
Madagascar Mahajunga Entrepôts
Huile sur toile
81 x 100 cm (p29)
2005
Madagascar Mahajunga Rues ensablées
Huile sur toile
81 x 100 cm (p30)
2005
Madagascar Peugeot bâchée en brousse
Huile sur toile
27 x 35 cm (p31)
2011
Route en campagne
Huile sur toile
24 x 33 cm (p32)
2016
Martinique Tropique aux toits noirs Grand Rivière
Huile sur toile
130 x 162 cm (p33)
1988
Tananarive Maison rose avec Land Rover
Huile sur toile
97 x 130 cm (p34)
2003
Madagascar Camion sur la route de Tuléar
Huile sur toile
73 x 92 cm (p35)
2001
Paysage avec cèdres et voiture
Vernis mou, eau forte et aquatinte
33 x 50 cm (p36)
2011
Madagascar Camion à la tombée du jour
Huile sur toile
50 x 61 cm (p37)
2005
Nocturne avec voiture
Huile sur toile
19 x 27 cm (p38)
2016
Double page
Panoramique avec voiture
Huile sur toile
55 x 190 cm (p39)
2007
Cargo épave et iceberg
Remerciements
Nos remerciements vont tout particulièrement au Conseil départemental de la Haute-Garonne et à son Président Georges Méric, à Didier Cujives, à Alain Filhol et Richard Emerique, Gérard Warret Domi,ique Pichon-Montané, Guillaume et Françoise Roussel, ainsi qu'à Anne Brunswic et Hélène Bec