C’est une belle fin de journée. Debout dans l’atelier, je regarde les toiles que j'ai choisies. Elles me rappellent des lumières, des ambiances diurnes ou nocturnes, crépusculaires parfois. Pour beaucoup, je les ai peintes au retour de voyages lointains - aux îles subantarctiques françaises, en Terre Adélie, à Madagascar.
Chaque peintre doit trouver une lumière qui lui est propre. La mienne est souvent tropicale, un tropique contemporain loin des clichés surannés d’un Éden rêvé, une mise en scène de notre modernité. Les camions et pick-up, les voitures et les trains, les avions et les cargos ont définitivement transformé ces paysages tropicaux saturés de lumière. Je ne me lasse pas d’explorer le rapport complexe qu’ils créent plongés dans ces espaces d’outremer. Dans les zones polaires, ce
sont les cargos qui donnent forme à la glace, l'éventrent, la disloquent, la
repoussent, l'amassent sur les rebords escarpés.
J'aime peindre le monde contemporain et les emblèmes des temps modernes. Sur mes toiles, les lignes anguleuses des engins mécaniques coexistent avec le velouté
des nuages, la profusion végétale des grands arbres, la roue d’un cocotier, le bleu lumineux d’une fin d’après-midi, le blanc cendré d’un sable corallien.
Les hommes et les femmes ne sont pour autant pas absents de l’arène des toiles. On y croise des scènes de vie à Madagascar, les retours de pêche sur fond bleu vert de lagon, les marchandes tout à leur négoce, les lavandières sur les berges d’un fleuve, des portraits, la lumière qui glisse sur un corps dénudé de femme, peau noire, peau blanche, des rêveries
intimes.
Peindre le monde…